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Ce roman qui a remporté le Prix de la Romance 2019 est le premier de Claire Volanges publié aux Editions Nouvelles Plumes, une maison d’édition que j’apprécie beaucoup. Elle est spécialisée pour lancer la carrières de jeunes auteurs et je dois dire qu’elle est assez douée pour dégoter de superbes talents et Claire Volanges ne fait pas exception !
Je viens de refermer ce livre « Le parfum de Katsu » et je comprends mieux pourquoi il a remporté cette distinction car il était tout simplement « wouah » <3 C’est dans le Japon ancestral que le parfum envoûtant de ce roman m’a entraînée et j’en ai encore la tête enivrée de cette petite merveille littéraire !
Le pouvoir des mots, des vers, peut avoir un impact irrémédiable sur nous. Ces effluves de mots qui vous effleurent, vous caressent, vous percutent et qui agrippent votre coeur. Ils peuvent soit vous porter afin que vous preniez votre envol ou soit ils peuvent vous renverser et vous anéantir…
Mais l’écriture peut être un moyen de s’élever parmi les autres, au temps où la lecture et l’écriture n’étaient réservées qu’aux nobles et surtout aux hommes, c’est un luxe pour une femme d’y avoir accès.
Quoiqu’il en soit, je redescends de cette lecture enchantée par cette écriture dont les mots laissent sur leur passage une fragrance de féminité à l’état pur ! C’est cet aspect de ce roman qui m’a totalement séduite, le portrait de la femme brave qu’est Katsu qu’a dépeint l’autrice.
Résumé:
À quelques jours des noces qui doivent l’unir à Akeko Kawa, l’héritière du clan ennemi de son peuple, l’honorable seigneur de guerre Toru Okami croise la route de Katsu, modeste paysanne mariée à un homme violent qui se plaît à l’humilier chaque jour pour lui faire payer son infertilité. Toru est troublé par la beauté sauvage et le parfum envoûtant de la jeune femme. Quand celle-ci sauve d’une chute le père gravement malade de Toru, le seigneur l’invite à rejoindre le château pour devenir la suivante de sa future épouse…
Au temps des mariages arrangés où la femme n’est réduite qu’à sa capacité de fertilité et n’a pas plus d’importance qu’un objet, l’auteure dépeint le portrait d’une femme n’ayant connu dans sa jeune vie que la souffrance et l’humiliation, dépossédée de son corps par un mari violent ! Forcée de se marier avant ses quatorze ans, katsu subit depuis douze ans la brutalité et la colère de l’ignoble Rintato et de sa belle-famille. Une femme n’est utile que pour donner un héritier à son mari, hors depuis toutes ces années le ventre de Katsu reste désespérément vide.
» Ta bienveillance et ta douceur sont celles d’une mère, ne l’oublie pas. Ton corps est stérile mais ton coeur ne l’est pas. »
J’ai ressenti une forte empathie pour le personnage de Katsu qui pendant toute sa jeunesse a été traitée comme une moins que rien et non pas comme une femme. L’amour, la tendresse et le désir sont des choses qu’elle ne connaît pas n’ayant reçu que des brimades , des insultes et des coups. Toute sa jeune existence n’a été que souffrance et pourtant on le pressent immédiatement, Katsu possède un caractère combatif. A sa manière, elle résiste et elle se bat même si elle n’a jamais eu conscience de sa beauté et de ses valeurs. C’est une femme meurtrie dans son âme, dont le coeur s’est éteint jusqu’à ce qu’elle croise le regard du futur Daimyo ( équivalent du seigneur), Toru.
J’ai beaucoup apprécié le portrait de Toru. C’est un jeune homme qui malgré son masque autoritaire de capitaine des armées, au fond de lui se cache une âme idéaliste et pacifique assez singulière pour l’époque. Il a sur ses épaules le poids du protocole et des traditions car lui aussi, pour le bien de son peuple, doit contracter un mariage de convenance avec la fille d’un clan ennemi. Contrairement aux autres hommes qui considèrent la femme comme « une femelle » (oui ma part féministe a été révoltée par ce terme :p), Toru voit Katsu comme son égale, sa moitié.
Dans les romances, ce que j’aime avant tout c’est le passage de la rencontre. Je trouve que les trois quarts de la magie se déroulent à cet instant, quand les regards se croisent et se confrontent pour la première fois car c’est à cet instant que le destin des personnages bascule.
« Dans sa force et sa dignité, Katsu s’élevait pour la première fois, et ses joues d’un rouge flamboyant éclosaient comme des fleurs de Sakura annonçant un renouveau. Un printemps de révolte dont elle serait la maîtresse «
Malgré un contexte violent, sanglant où la guerre entre les clans fait rage, j’ai aimé le doux contraste avec la sensibilité des descriptions et de l’écriture du roman. Si la brutalité des personnages est perceptible, elle est estompée par les élans de romantisme de nos deux personnages car c’est par la sensibilité et le désespoir qu’ils vont s’attirer. La parole n’est pas nécessaire, il n’y a qu’à écouter la mélodie du coeur, et se laisser porter par les vers aux arômes d’amour et d’espoir pour apercevoir le spectre de la liberté.
De sa rencontre avec Toru, Katsu va se révéler à elle-même. La fleur restée sous la glace après un éternel hiver va enfin éclore pour dévoiler tout son essence, et là où son ventre est sans vie, se développe une boule de feu faite de passion et de révolte, libérant enfin la personne qu’elle est vraiment, la femme qui sommeille en elle. La féminité sort de tous les pores de sa peau ! L’auteure nous livre le portrait d’une femme dans son authenticité.
L’écriture raffinée de ce livre éveille à la tendresse contrastant avec un contexte de guerre et insufflant au passage un élan d’espoir et de combativité. Un bel hommage pour toutes les femmes !
Un livre au parfum envoûtant et poétique. Une magnifique lecture qui saura éveiller votre part de féminité ❤️
Rendez- vous au Tome 2 pour la suite ! Je ne vous cache pas mon impatience 🙂
EXTRAIT
Le messager lui avait donné son prénom.
Le prénom qu’il buvait, dont il se nourrissait avec un plaisir insatiable. « Le parfum de la terre », tel était le nom de celle dont l’odeur avait si profondément marqué son âme. L’émotion qu’il avait ressentie au premier regard se conformait à mesure qu’il murmurait son prénom en cherchant en vin les étoiles. Ce parfum fabuleux lui avait aussitôt rappelé le bonheur qu’il éprouvait enfant, lorsqu’il parcourait son domaine, effleurant chaque pierre, caressant chaque tronc, buvant de l’eau de chaque rivière. Ce parfum était bien celui de la liberté , et l’envie d’y goûter affolait tous ses sens.
Les yeux clos, il essayait de se ressaisir, de ne plus penser à Katsu, de se concentrer sur son avenir et sur la promesse qu’il avait faite à son père. Il était un seigneur de guerre et ne devait pas montrer de faiblesse. Pourtant, pour la première fois de sa vie, Toru sentait que son âme était fêlée, percée d’une flèche tirée par une paysanne au regard d’or. Elle l’avait ébranlé. En elle, il voyait ce qu’il aurait voulu être. Katsu était bien plus courageuse que lui. Toru aurait voulu agir de même et déjouer son destin. Il l’enviait. Il jalousait son courage, il voulait la comprendre , savoir où une femme de ce statut avait pu puiser de telles ressources. Même sur un champ de bataille, il n’avait jamais vu un regard aussi déterminé que celui de Katsu, le regard d’une personne qui a déjà tout vécu et qui ne craint plus rien, pas même la mort. Le regard d’une personne qui ne croit plus en rien et qui pourrait mourir sans regrets.
Il ferma les yeux un instant, voulant fuir ses réflexions. Le visage de Katsu lui revint aussitôt. Le souffle court, une main sur le coeur, Toru crut s’évanouir tant la chaleur du bain lui donner le tournis. Sous ses paupières, l’image de Katsu lui revenait inlassablement. Il se sentait envoûté, piégé. Son mariage était prévu dans un mois, et son coeur endormi jusqu’alors s’éveillait, frappé par l’authenticité d’une inconnue. »
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